EDITORIAL TRIMESTRIEL de Jean Pellegrino [Actualité économique et du crédit du 1 avril au 30 juin 2007] - ARC®

Pas de tribulation pour les chinois dans le monde ?

Cela n'a étonné personne : l'économie Chinoise à crû d'un peu plus de 11% au terme du premier trimestre 2007 (sur 12 mois glissants). Outre les mesures prudentielles auxquelles les autorités chinoises contraignent par palier leurs établissements bancaires (augmentation des réserves de change), la politique du Yuan sous-évalué devrait perdre peu à peu de sa réalité en raison d'une remonter des taux chinois. On notera que cette perspective ne semble pas freiner la croissance des établissements bancaires chinois ni l'entrée du pays dans une économie où le consommateur prend toute sa place et use de tous les « outils » propres à son « épanouissement » dont, notamment, une belle carte de crédit en forte expansion dans l'empire du Milieu.

Révolutionnaire, la Chine l'est ncore plus en inaugurant un nouveau mode d'interventionnisme sur les marchés internationaux : après avoir fourni les plus importantes réserves en Dollar (+1.200 Milliard d'US$), la Chine s'apprête à prendre part à la forme la plus aboutie du capitalisme en rachetant 10% du fond d'investissement Blackstone pour 3 Milliard d'US$. De quoi mettre un pied à moindre frais dans la diversification de ses investissements à ce jour investis en emprunts du Trésor américain. Cette perspective, qui semble soulever de plus en plus d'oppositions aux États-Unis mêmes, risque cependant de représenter un passage obligé pour maintenir le niveau de production de la première économie du Monde, toujours engluée dans ses déficits abyssaux. Une Chine jouant le rôle de locomotive comporte nécessairement des revers de médaille qu'il serait sans doute présomptueux de rejeter trop hâtivement...

Immobilier espagnol : caramba !

L'annonce couvait depuis quelques mois (voir n° précédents), l'économie Espagnole supporte une épée de Damoclès au dessus de sa belle crinière flamboyante : le poids de la construction et du crédit (pour le bâtiment mais aussi du crédit à la consommation) dans la croissance du pays, lui fait courir un risque majeur en cas de ralentissement du secteur de l'immobilier. La flambée des salaires ayant par ailleurs réduit la compétitivité des entreprises (concurrencées en Europe par les nouveaux pays adhérents), le pays perd ainsi de sa capacité exportatrice, ce qui ne tendrait pas à amortir le choc en cas de crise soudaine.

Diagnostiquée à plus ou moins brève échéance, elle parait pour certain inéluctable et le « coup de semonce » du 24 avril (qui a vu le cours de certaines valeurs, fortement exposées dans l'immobilier, brusquement attaqué) n'en serait qu'un avertissement... ultra provisionnés (en tous cas au-delà des règles habituelles), le risque de dérapage des impayés est malgré tout grandement nié par les banques Ibériques qui semblent pratiquer la méthode Couet comme personne.

Toutefois, ce retournement de marché semble satisfaire le gouvernement qui, s'il anticipe jusqu'à 1 point de PIB en moins et 50.000 chômeurs supplémentaires, sait pouvoir éviter ainsi une surchauffe de l'économie bien plus catastrophique à terme. Une prise de conscience qui l'encourage même à promulguer un ensemble de lois restreignant largement la spéculation immobilière, du jamais vu au pays de la Costa brava de béton !

Banques françaises, belles dehors mais pas la forme à la maison...

Le tableau est contrasté du côté des banques françaises. En tous cas, la concentration et le développement des grands réseaux cachent certainement des défis à venir dont celui, très proche, de l'essoufflement de la banque de détail. Plombée par un taux d'équipement de la clientèle record en Europe, par un poids grandissant des réseaux concurrents (notamment de courtage), de plus en plus présents, freinée par le peu de relais de croissance prévisibles à brève ou moyenne échéance et, enfin, limitée par un réseau déjà très développé, la croissance du secteur de la banque de détail ne devrait pas se révéler bien plus vaillant à l'avenir que depuis quelques mois.

En comparaison, les grandes banques universelles (SG, BNP Paribas et CASA) croissent comme jamais à l'international, où des gisements de marges leur semblent promis... Ce secteur « off shore » fait même appel à de savants modèles de stratégie et rien n'est trop beau pour jouer (et gagner ?) la carte de l'international, perçu comme un facteur majeur de différenciation (même si, à l'exemple de la SG, une défaillance dans le domaine de la banque de détail peut également jouer, négativement, comme facteur notable de différenciation vis-à-vis de ses deux principaux concurrents)... En comparaison, le modèle suivi par le Crédit Mutuel depuis sa création est perçu comme un contre exemple parfait : 2e banque de détail de l'Hexagone, le Crédit Mut en est le champion incontesté, surtout depuis qu'il a racheté le CIC et son réseau d'agences. Sa stratégie de diversification à outrance de l'offre (services au particulier, maison de retraite, téléphonie, etc) parviendra-t-elle à lui assurer une nécessaire croissance sur un marché très concurrentiel ? L'avenir le dira, comme il nous éclairera sur la pertinence du caractère mutualiste d'un groupe aux mille casquettes.

Actualité en France

Nous abordions au trimestre dernier la question du développement des banques en France en évoquant une stratégie fine de segmentation de la demande. C'est au travers d'une segmentation de la production de l'offre de produits bancaires et de crédits que nous aborderons le marché français du second trimestre 2007. Signalons tout d'abord la stratégie de certains intervenants visant à s'adosser à des réseaux pratiquant un métier connexe (comme l'assurance), telle la Banque Postale dont la distribution de crédits immobiliers a grandement progressé (+25%) via son réseau d'agences, en attendant, courant 2007, les premier retours des ses réseaux partenaires (un accord avec la Matmut a été signé en avril). Notons également l'accord AGF/Laser, prévoyant le recours réciproque à leur réseau de distribution pour la commercialisation de leurs produits respectifs.

En matière de distribution de crédit, ce processus de recherche de la segmentation se précise également pour d'autres groupes tel la BNP Paribas qui, simultanément, met en place un nouveau pôle « Financement du particulier » en regroupant les activités de ses filiales UCB et Cetelem (concurrentes, entre autres, d'acteurs aussi importants que GE Money Bank), tout en se diversifiant au travers du lancement d'une offre de crédit immobilier en ligne...

Dans ce contexte, les annonces, apparemment sans grand rapport, d'une part, d'une externalisation croissante de l'activité de recouvrement de créances (métier à faible valeur ajouté), vers des pays low coast et celle, d'autre part, d'une augmentation du surendettement des ménages français au 1er trimestre (même s'il demeure très contenu), nous semble significative d'un mouvement général des établissements visant à concentrer leurs efforts sur des stratégies de distribution tout azimut, signe, très certainement, d'une trop grande difficulté à préserver des marges sur un marché peut-être arrivé à maturation critique (voir dossier Focus : « Banques françaises, belles dehors, mais pas la forme à la maison... »).

Actualité en Europe et dans le Monde

Ainsi en va-t-il sur tous les marchés de services bancaires Européens, dont la France : le suréquipement des clients et l'offre de crédit abondante (surtout en période taux bas) exercent une tension de plus en plus forte sur les marges. La tentation des établissements est donc de préserver leurs revenus, celle des consommateurs (relayés par les instances Européennes) serait au contraire d'exercer le chantage au mieux offrant et d'appeler à une harmonisation des réglementations. A ce jeu il n'est pas dit que les consommateurs Européens, surtout Français, sortent vainqueurs, tant les modèles bancaires européens (assez proches) offrent peu d'alternatives aux banques que de celle de reporter sur des services aujourd'hui quasi-gratuits, les recettes qui seraient sacrifiées sur l'autel du consumérisme.

Cette perspective est d'ailleurs d'autant plus vraisemblable que les grands réseaux, on l'a vu, se partagent un marché arrivé à maturité, seulement soumis à un mouvement de concentration général (l'Italie vient de constituer le 2e groupe bancaire Européen, 1er de la zone Euro, par sa capitalisation, Unicrédit-Capitalia). Tous les autres marchés mondiaux représentent des gisements d'enrichissement colossaux pour des établissements européens tous muscles saillants : Inde (dont la BNP Paribas voudrait financer les infrastructures), Turquie (ING tenté à son tour par l'aventure), jusqu'à l'Algérie dont le marché du crédit à la consommation est testé par Cetelem depuis 1 an et justifie que le spécialiste français reconduise l'opération... Des perspectives immenses (on prévoit un triplement des revenus bancaires en Europe de l'Est d'ici 8 ans) qui ne doivent cependant pas cacher des niveaux de risque non moins réels : développement outrancier des cartes de crédit en Asie (de 3 à 6 fois le niveau de 1997) qui relance le spectre de la crise financière de 1997, endettement immobilier à taux bas et devises fortes dans les pays de l'Est (dont le risque est certain en cas d'effondrement de leur devise), endettement record des russes dont les remboursements affichent 5% de défaillance sans que cela ne préoccupe les banques nationales dont l'une d'elles, la VTN, vient de réaliser la plus grosse introduction boursière de l'année dans un contexte de croissance inimaginable dans d'autres pays : +47% de sommes empruntées en 2006, une moyenne de +30%/an prévue d'ici 2010, +75% annuels de crédit à la consommation, le tout essentiellement distribuée par... les réseaux de banque de détail ! Un rêve déjà lointain sur nos marchés Européens.

Taux / Devises

Au fil du temps certaines annonces finissent par ne plus étonner personne. Ainsi, qu'elles auraient été les réactions des commentateurs, il y a seulement 1 an, si l'un d'entre eux avait osé émettre l'idée que le Dollar Américain puisse ne plus être la devise de référence mondiale, que le « prix du pétrole, comme l'envisage un journaliste de Newsweek, soit libellé en Euros » ? Probablement la panique sur tous les continents, chez tous les préteurs comme chez tous les emprunteurs... Or l'idée, aujourd'hui, n'effraie plus personne. Certainement à cause d'un déficit commercial abyssal qu'un Dollar faible permettrait de résorber à condition que dette publique et épargne privée soient remobilisées pour permettre les investissements (à condition aussi, si ça n'était pas trop demander, que le Yuan soit réévalué et le consommateur Japonais remotivé, ce qui n'est pas le plus simple dans l'histoire).

Mais beaucoup verraient dans cette révolution Copernicienne la Genèse d'un retour à une économie mondiale plus équilibrées, assise sur tous ses piliers (Américain, Européen, Asiatique, Moyen-Oriental). Cette hypothèse fait-elle suite à l'émergence d'une autre devise forte, l'Euro, dont on sait qu'elle retient déjà la préférence des banquiers centraux ? En tout état de cause, l'Euro n'a vraiment l'air de craindre aucune autre devise, tant elle demeure ferme face au Dollar, mais aussi face au Yen et au Franc Suisse. Cette fermeté est d'ailleurs loin d'être remise en cause, dans le contexte dynamique que connait la zone Euro, ce dynamisme ne faisant guère courir qu'un risque inflationniste, lequel ne pousserait guère la FED qu'à resserrer ses taux directeurs, laquelle opération, aux dires de la commission, n'aurait que peu de conséquences sur ce dit dynamisme Européen porté par une locomotive Allemande consolidée... et de meilleures perspectives Françaises.

Une maîtrise de l'inflation également au programme de la FED qui maintient son emprunt à 10 ans au dessus de 5%, soit environ 1 point de plus que les taux Européens, lesquels disposent donc d'une marge de manœuvre non négligeable. Cependant, sans doute aspirée par l'augmentation des carburants, des matières premières et des salaires, la courbe des prix US progresse toujours... Non vraiment, en dehors des suites de la crise des subprime américaine, on peut se demander ce que craindrait l'économie Européenne, affichant même 2,7% de prévision en hausse pour 2007 (contre 2,1% pour les E.U), sans inflation et offrant des taux encore bas par rapport au reste du Monde (sauf le Japon)... Que le Dollar ne lui tombe sur la tête peut-être...


Achevé de rédiger le 31 juillet 2007


Jean Pellegrino - Rédacteur d'articles, de revues de presse et d'éditoriaux. Son ambition est de faire partager un point de vue synthétique et original sur l'actualité économique en général et du crédit ou du rachat de crédits en particulier, tout en insistant sur les enjeux liés à cette activité.


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